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24/01/2018

Les royalistes en Mai 68. Partie 1 : les royalistes, oubliés de l'histoire du mois de Mai ?

L'heure arrive de la remémoration de Mai 68, et les publications consacrées à ce sujet commencent à fleurir sur les tables des libraires, pour le meilleur comme pour le pire. La question d'une commémoration officielle a, semble-t-il, été abandonnée par l’État, ce qui, pour le coup, aurait pu paraître un peu étrange pour un mouvement dont on dit souvent qu'il fut, d'abord, subversif. Mais, en définitive, n'y a-t-il pas une certaine logique dans ce désir commémoratif d'un événement dont notre société contemporaine, dans ses aspects sociétaux et même économiques, semble la légitime héritière : n'est-ce pas ce que Daniel Cohn-Bendit paraît reconnaître quand il soutient le libéral-libertarisme aux côtés de l'ancien dirigeant du groupe d'extrême-droite Occident Alain Madelin, lui-même fervent néolibéral européen, et que, quelques années après, il rejoint bruyamment le candidat (devenu président) Emmanuel Macron, arguant là encore de son européisme fondamental, autre nom du « libéralisme sans entraves en Europe » ? A défaut d'y répondre aujourd'hui de manière définitive, la question mérite au moins d'être posée...

 

Dans cette mémoire de Mai 68, où sont les royalistes ? Quelques lignes leur sont consacrées dans le livre passionnant de Ludivine Bantigny, sobrement intitulé « 1968. De grands soirs en petits matins », mais leur trace reste bien peu visible dans la mémoire collective, cinquante ans après, comme s'ils n'avaient jamais existé en cette année-là et dans ces événements qu'ils ne pouvaient, pourtant, ignorer. En fait, coincés entre le marteau de la contestation et l'enclume du Pouvoir, leur place n'était guère commode et les ambiguïtés mêmes du royalisme de l'époque, qui ne se dénoueront qu'en partie dans les années 1970 et singulièrement avec la première décennie intellectuelle et militante de la Nouvelle Action Française de Bertrand Renouvin et Gérard Leclerc, ne plaident pas vraiment pour une histoire simple et immédiatement compréhensible...

 

Et pourtant ! Les royalistes, et à l'époque il s'agit surtout de l'Action Française, sont actifs, aussi bien intellectuellement que physiquement, et ils ne se contenteront pas de regarder le train de l'histoire rouler et siffler, mais tenteront même d'agir autant qu'ils réagissent. Au-delà des manifestations quotidiennes que l'AF organise près de l'Arc de Triomphe du 13 au 18 mai, et qui paraissent bien pâlottes au regard des cortèges du Quartier Latin, les jeunes monarchistes ne désertent pas les lycées ou les facultés, certains participant même aux comités de grève locaux quand d'autres, en revanche, affrontent rudement les militants d'extrême-gauche qui profitent de l'occasion pour s'imposer, et que d'autres encore tiennent des stands royalistes dans les halls d'université tandis que Pierre Debray, véritable penseur d'un royalisme qui se veut contemporain et prospectif, prend la parole dans un amphi parisien.

 

La presse royaliste d'AF, Aspects de la France (hebdomadaire) et AF-Université (mensuel des jeunes militants), ainsi quelques bulletins locaux, le plus souvent ronéotypés, connaît alors, et pour quelques années, un certain renouveau, nourri par l'arrivée de nombreuses nouvelles énergies, et la lecture des articles de cette époque, qui court jusqu'au printemps 1971 et la scission qui donnera naissance à la « NAF » (Nouvelle Action Française, à la fois titre du nouveau journal monarchiste et du nouveau mouvement), prouve ce renouveau qui, en définitive, ne sera qu'une « renaissance » provisoire du courant royaliste maurrassien et laissera parfois plus de regrets que de traces... Mais cette lecture peut ne pas être inutile, et il faudrait, au moins, en tirer les meilleures pages pour le faire savoir et montrer que, contrairement à tant de mouvements utopistes ou doctrinaires qui n'ont pu que disparaître de leurs propres contradictions, une part de « l'intelligence d'AF » a su discerner les enjeux du moment et les perspectives possibles, même si tout cela a pu, par la force des choses, s'avérer vain, faute d'une traduction politique crédible et pérenne sous la forme d'un mouvement capable de s'enraciner dans un « pays réel » parfois trop mythifié pour être vraiment compris et saisi.

 

Cette leçon de l'histoire politique du royalisme d'après-Mai n'est pas si désespérante, mais encore faut-il qu'elle soit accessible pour être compréhensible : c'est pour cela que, l'an dernier, j'ai repris mon étude sur l'Action Française des années 1960 jusqu'à 1971 dont je donnerai, sur ce site, quelques éléments qui, s'ils sont d'abord historiques, sont aussi politiques. Car le « patrimoine » politique royaliste mérite d'être étudié, parfois valorisé, mais aussi critiqué, non dans un pur exercice intellectuel mais dans la perspective d'une réflexion plus large sur les conditions de construction et d'efficacité d'un royalisme contemporain débarrassé de ses scories et retrempé à la fois dans les combats nécessaires d'aujourd'hui et les enjeux du lendemain, et dans les fondements d'une pensée plus riche que les caricatures (y compris celles que certains royalistes n'ont pas manqué de répandre ou de représenter...) ne le laissent supposer. Il me semble que le jeu, mieux encore : l'enjeu, en vaut la chandelle !

 

 

 

 

(à suivre : Le royalisme à la veille de Mai 68 ; Les royalistes dans les événements ; « Le socialisme de Maurras », vu par Gérard Leclerc ; Les analyses de Pierre Debray ; etc.)

 

 

 

 

09/05/2016

Ma liberté d'expression...

Samedi dernier se tenait un colloque organisé par l'Action Française sur le thème évocateur « Je suis royaliste, pourquoi pas vous ? », et j'y ai participé, ce qui m'a valu quelques réactions, fort contrastées au demeurant, entre indignation et satisfaction... En fait, ma présence n'aurait pas suscité d'émoi si, parmi les intervenants, il n'y avait eu Marion Maréchal-Le Pen, député du Front National, véritable « vedette » de l'après-midi aux yeux des médias et d'un certain nombre d'auditeurs : d'ailleurs, les micros et les caméras n'étaient là que pour elle, et pour les mots qu'elle pouvait prononcer, certains journalistes y voyant l'occasion de faire apparaître les divisions au sein du parti de sa tante ou de diaboliser une femme politique « se commettant » avec les royalistes de l'Action Française, mouvement dont France-info et d'autres rappelèrent les travers idéologiques et historiques, jusqu'à Vichy...

 

Je connais bien l'histoire de l'Action Française, et je crois même y avoir, un temps qui n'est pas si lointain, participé : c'est par elle, en tant que mouvement et école de pensée, que je suis devenu militant royaliste, même si je dois aussi à Bertrand de Jouvenel, ce libéral fidèle du comte de Paris, une grande partie de mon chemin intellectuel vers la Monarchie, et je ne renie pas cet héritage d'A.F. ou cette partie de mon histoire personnelle, même si j'ai pris, depuis longtemps, d'autres voies et que je réserve ma seule fidélité politique à la Famille de France tandis que je ne revendique qu'une seule appartenance « partisane », celle du Groupe d'Action Royaliste (dont j'ai accepté la vice-présidence dès 2009), étant, encore, toujours et avant tout, royaliste tout simplement. Cela explique que je sois candidat aux élections européennes sous l'étiquette de l'Alliance Royale, que j'ai été le rédacteur en chef du Lys Rouge, la revue d'histoire du royalisme publiée par la Nouvelle Action Royaliste, et que je vais parler de temps en temps dans des réunions de l'Action Française, comme ce samedi-là. Quant aux textes de ce blogue, ils sont « libres de droits » et tout mouvement, journal ou site informatique, qui se revendique royaliste, peut les utiliser, pourvu qu'il en indique la provenance et l'auteur... Je suis royaliste, et je veux faire avancer la cause royale : j'ai l'habitude de dire que « je ne veux pas mourir royaliste, je veux vivre en Monarchie » !

 

Quelques uns me reprochent ma participation à un événement auquel participait Mme Maréchal-Le Pen et auquel avaient été invités MM. Mélenchon et Macron, qui ont décliné l'offre. J'ai écouté l'entretien que la parlementaire a accordé lors du colloque et j'y ai entendu quelques éléments intéressants, je ne peux le nier : à ceux qui y verraient une compromission de ma part avec « l'extrême-droite », je répondrai avec un sourire que, parfois, « le diable porte pierre »... Je combats au nom de valeurs et pour l'établissement d'un régime qui, lui, devra s'accommoder de toutes les diversités politiques de droite comme de gauche sans, pour autant, renier son identité propre et sa position d'arbitre suprême du pays. D'autre part, je sais faire la part des choses et je n'oublie ni l'histoire ni son poids, sans méconnaître non plus ses pièges et ses masques. Et je suis assez solide pour résister aux tentations politiciennes ou électorales quelles qu'elles soient...

 

Il me paraît d'ailleurs inquiétant d'avoir toujours à se justifier de vouloir discuter avec tout le monde, de « Nuit debout » aux « identitaires » (par exemple) : j'ai toujours voulu garder cette liberté d'expression et d'écoute, d'approche et de débat, ce qui ne m'empêche pas de descendre, quand il le faut, dans la rue et dans l'arène contre les uns ou les autres, sans m'interdire de tendre la main vers l'autre côté de la barricade.

 

Ce qui m'importe, c'est la liberté d'expression, la possibilité du débat et la nécessité de la Monarchie. Cette Monarchie qui n'est rien d'autre, en définitive, que la forme politique française de l'unité nationale (celle des peuples fédérés, des « provinces unies » de France), de l'écologie intégrale et de la justice sociale face au « consommatorisme » de la société de consommation, au règne multiforme de l'Argent et au globalitarisme mondial dévastateur des paysages comme des âmes. Philippe VI, le premier de la famille des Valois sur le trône de France, s'écriait, au cœur de la bataille, « Qui m'aime me suive ! »... Une proposition tout à fait honnête et éminemment politique, en fait, que je fais volontiers mienne !

 

 

 

21/10/2014

Ecologie et "politique d'abord".

 

J'étais dimanche au Festival du livre et de la presse d'écologie, dans le quartier de Belleville, et j'en suis revenu avec les bras chargés de littérature scientifique, militante ou simplement informative, après avoir longuement discuté avec quelques exposants et écrivains présents. Le fait de me présenter comme royaliste, professeur d'histoire de surcroît, n'a guère choqué, même si j'ai parfois senti, au début, quelques crispations chez des militants plus habitués à la conversation avec libertaires ou « zadistes »...

 

En fait, il n'y a rien d'étonnant à ce que les royalistes soient des partisans, sinon de la décroissance (même si, personnellement, je suis proche de ce courant de pensée et de pratique), en tout cas de la préservation de l'environnement et de ses équilibres nécessaires, de la biodiversité comme de ses espaces : quoi de plus naturel pour des royalistes qui, depuis plus d'un siècle, répètent dans leurs cercles d'études que « l'on ne commande à la nature qu'en lui obéissant » ! C'est d'ailleurs une des premières citations que j'ai retenues des cours de formation politique de l'Action Française du début des années 1980, sans doute au détour d'une page du fameux cahier bleu rédigé par Bernard Pascaud sur « l'empirisme organisateur », et que je n'avais de cesse de répéter lors des discussions politiques au lycée Chateaubriand de Rennes, comme une sorte de sésame...

 

Or, aujourd'hui, et malgré tous les avertissements des « amis de la nature » (qui ne sont pas forcément favorables à « l'impuissance face à la nature », cette dérive qui déifie la nature au détriment de toute humanité et de toute intégration de cette dernière dans un écosystème terrien), nos sociétés industrialisées ou post-industrielles (ou les deux à la fois) ne savent pas s'entendre avec l'environnement et ne savent plus l'écouter : l'Homme se fait démiurge et ne veut accepter aucune limite à sa toute-puissance, asservissant complètement la nature quand il faudrait s'en faire une alliée, notre amie... C'est la démesure arrogante et destructrice de l'Homme contemporain, cette fameuse hubris que dénonçaient déjà nos ancêtres grecs depuis Homère !

 

En feuilletant les livres et revues achetées ce dimanche, je relève quelques excellentes propositions et initiatives, dont certaines sont déjà pratiquées depuis quelques temps, et je note les appels à changer de logiciel idéologique sur la question économique et au regard des enjeux environnementaux. Mais, souvent, et au-delà des appels libertaires à « rompre avec le Système » (Système dont la définition varie selon les interlocuteurs et les doctrines, mais qui paraît porter le plus souvent les traits du capitalisme et du libéralisme, parfois confondus dans la même entité...), les uns et les autres butent sur la question politique, certains la négligeant carrément quand d'autres la maximisent au détriment de « l'état d'esprit » qui, pourtant, ne peut être si facilement contourné.

 

Pour ma part, je reste persuadé que le « Politique d'abord » (à ne pas confondre avec le « Tout est politique » des gauchistes de l'après-Mai 68) cher à Maurras doit être considéré comme le moyen de résoudre la délicate équation entre le bien-être des populations et le respect des équilibres écologiques. En effet, c'est l’État qui peut agir, en politique et non en simple gestionnaire d'une gouvernance qui n'est rien d'autre que la soumission du pouvoir politique aux puissances de la Finance et de l’Économie. C'est l’État qui peut imposer, au nom du Bien commun, des limites aux féodalités actionnariales et économiques qui ont tendance, aujourd'hui, à s'émanciper de toute contrainte et, surtout, de tout devoir et de tout sens du service, prises qu'elles sont dans une logique du « Toujours plus » que notre bonne vieille Terre ne peut supporter éternellement, quelles que soient ses capacités exceptionnelles à s'adapter et à réagir.

 

Encore faut-il que l’État soit libre de ses décisions, de ses actions, et qu'il ne doive rien à des commanditaires qui ne seraient rien d'autre que sesvéritables maîtres ! La crainte des libertaires à l'égard d'un État qui soit le simple représentant des puissances matérialistes et capitalistes se comprend, au regard de ce qu'est la République quand elle n'a que la démocratie représentative pour se légitimer, cette forme de démocratie (qui peut néanmoins convenir pour certaines assemblées ou pour les communes) « achetant » l’État (par le jeu des partis et des groupes de pression auxquels ils peuvent être redevables d'un succès souvent temporaire, d'une élection à une autre) plus que le servant, et pouvant prêter le flanc à diverses formes de corruption néfastes pour l’État et la nation elle-même. L'exception d'un de Gaulle est justement liée au fait que sa propre légitimité venait d'abord de l'événement fondateur du 18 juin 1940 et non d'une élection (celle-ci ne venant « qu'après »...), ce qui lui donnait une grande liberté, quasiment capétienne, pour « parler et décider »...

 

Or, aujourd'hui, pour rendre sa liberté à l’État, il faut d'abord la rendre à sa magistrature suprême : c'est la fonction même d'une Monarchie qui ne doit rien aux jeux de partis ou à « l'entretien des clientèles » ! Et, qu'y a-t-il de plus naturel que la transmission de cette magistrature suprême du père au fils (ou à la fille) ? Un Pouvoir à ce point marqué et légitimé par le fait naturel de la naissance, de l'apparition d'une vie nouvelle au cœur d'une famille, n'oublie pas ce qu'il doit, justement, à la nature, au cycle éternel de la vie, ce qu'il faut préserver et transmettre aux générations à venir...